Cautionnement : 54 moyens de défense et de recours de la caution - Me Thomas CANFIN

Cautionnement : 54 moyens de défense et de recours de la caution

 

Message important à l’attention de nos lecteurs

Nous attirons votre attention sur le fait que cet article a été publié avant l’entrée en vigueur des ordonnances du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés. Certains passages de cet article ne sont donc plus à jour et ne correspondent plus au droit positif découlant de cette réforme.

Il n’est pas impossible qu’une mise à jour de cet article soit publiée prochainement.

En tant que de besoin, nous vous invitons à prendre directement attache avec Me Thomas CANFIN pour lui exposer votre situation et solliciter une consultation juridique spécifique à votre affaire.

Cordialement

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L’enjeu pécuniaire du contrat de cautionnement

Le contrat de cautionnement est le contrat par lequel celui qui se rend caution d’une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n’y satisfait pas lui-même (art. 2288 c. civ.).

Sans équivoque, le contentieux judiciaire du cautionnement est, pour l’essentiel, relatif aux différents moyens de défense soutenus par la caution en justice, afin d’échapper à son obligation de paiement, ou d’exercer un recours.

Le contrat de cautionnement est un contrat complexe dont l’enjeu pécuniaire est souvent très important à l’échelle d’un patrimoine.

Au demeurant, il est courant qu’au moment où elle contracte son engagement, la caution envisage de manière très lointaine et hypothétique qu’elle puisse un jour être actionnée par le créancier, en raison de la confiance qu’elle place dans le débiteur principal à respecter sa propre obligation de rembourser la dette (généralement au titre d’un contrat de prêt).

De fait, lorsque le débiteur principal est défaillant, échapper à la mise en cause de son engagement est très souvent vécu par la caution non pas comme une commodité, mais comme une impérieuse nécessité, relevant de “sa survie” financière personnelle.

Force est de constater que, sans dramatiser outre mesure, c’est d’ailleurs effectivement le cas !

Docteur en droit, Maître Thomas CANFIN est Avocat au Barreau de Nice depuis 2007. 

Il est spécialiste en droit commercial et des affaires et en droit bancaire.

Il défend la caution lorsqu’elle est actionnée par le créancier (le banquier ou l’organisme de cautionnement) ou à l’occasion d’un recours entre cautions de la même dette (cofidéjusseurs) ou avec la sous-caution qui garantit la caution de premier rang.

Dans le cadre de la gestion de ses dossiers, Maître Thomas CANFIN est amené à soulever différents moyens parmis les 54 principaux moyens de défense et recours ouverts à la caution, dont il constate qu’ils peuvent être utilement invoqués en justice.

Ce sont ces 54 principaux moyens de défense et recours de la caution qui sont exposés ci-dessous.

1. La défense de la caution tirée de l’absence de menace dans le recouvrement de la créance

Le créancier qui souhaite se prémunir contre l’insolvabilité de la caution peut solliciter du juge, le droit de pratiquer une saisie conservatoire sur les biens de cette dernière (art. L. 511-1 c. proc. civ. exéc.). Il peut également solliciter l’inscription d’une sûreté judiciaire.

Pour saisir le juge à bon droit, le créancier doit être en mesure de démontrer qu’il dispose d’une créance paraissant fondée en son principe et qu’il justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.

En la matière, la créance envers la caution existe dès la conclusion du cautionnement. Par suite, le créancier peut généralement facilement démontrer qu’il dispose d’une créance qui paraît fondée en son principe.

Une stratégie efficace de défense de la caution réside donc dans la démonstration que le créancier ne peut valablement arguer qu’il pèse une menace sur le recouvrement de la créance.

A cet égard, le fait pour le créancier de se contenter de démontrer la défaillance du débiteur principal n’est pas suffisant.

Pour demander la mainlevée ou le cantonnement de la mesure conservatoire du créancier, un axe de défense de la caution peut consister à apporter la démonstration qu’elle est solvable et qu’elle n’est pas susceptible de défaillir.

2. La défense de la caution tirée de la caducité de la mesure conservatoire

Une fois autorisée par le juge, la mesure conservatoire doit être exécutée par le créancier dans le délai de trois (3) mois, ce à peine de caducité (art. 511-6 c. proc. civ. exéc.).

Par ailleurs, toujours à peine de caducité de la mesure conservatoire, le créancier doit également introduire l’action en justice lui permettant d’obtenir un titre exécutoire, ce dans le délai d’un (1) mois à compter de l’autorisation de cette mesure par le juge (art. L. 511-4 et R. 511-7 c. proc. civ. exéc.).

Le non-respect de ces délais offre à la caution un moyen de défense, ce y compris dans certaines mesures, lorsque le débiteur principal est sous le coup d’une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire).

3. La défense de la caution dans le cadre de l’exercice de l’action paulienne par le créancier :

Il peut être tentant pour la caution, qui connaît les difficultés du débiteur principal et qui anticipe à court ou moyen terme l’action du créancier à son égard, d’accomplir certains actes de nature à diminuer la consistance de son patrimoine.

L’action paulienne (art. 1341-2 c. civ.) est l’action en justice qui permet au créancier de contester et de rendre inopposable à son encontre les actes accomplis en fraude de ses droits, ce y compris les actes de disposition (vente à vil prix, donation, etc.).

Le moyen de défense de la caution peut alors consister à apporter la démonstration que l’une au moins des trois (3) conditions légales et jurisprudentielles de l’action paulienne n’est pas réunie.

1. Ainsi, la caution peut tout d’abord chercher démontrer que la créance dont se prévaut le créancier n’était pas déjà née au jour ou l’acte litigieux a été accompli.

2. Ensuite, la caution peut également chercher à démontrer que l’acte litigieux ne constitue pas, pour elle, un acte d’appauvrissement. Seul un acte d’appauvrissement porte préjudice au créancier et lui permet l’exercice de l’action paulienne. Il a par exemple été jugé que le fait que la caution refuse d’accepter une donation, ne constitue pas un acte d’appauvrissement !

Au-delà, cet appauvrissement doit être à l’origine d’un préjudice pour le créancier en ce qu’il est générateur d’une insolvabilité apparente de la caution.

En l’absence d’appauvrissement de la caution, l’acte litigieux est également susceptible d’être attaqué par la voie de l’action paulienne lorsqu’il a pour conséquence de rendre inefficace un droit particulier dont disposait le créancier sur le bien.

3. Enfin, pour se défendre, la caution peut également chercher à démontrer l’absence de fraude de sa part. La caution doit démontrer qu’elle n’avait pas connaissance du fait qu’en la rendant insolvable ou en aggravant son insolvabilité, l’acte litigieux causerait un préjudice au créancier.

Au demeurant, lorsque l’acte litigieux a été conclu avec un tiers à titre onéreux, alors un moyen de défense de la caution peut consister à démontrer l’absence de complicité de ce tiers (absence de collusion frauduleuse). En effet, pour que l’action paulienne prospère dans cette hypothèse, le créancier doit démontrer cette complicité du tiers. Lorsque l’acte a été conclu à titre gratuit, le créancier n’a pas à rapporter la preuve de cette collusion frauduleuse.

Au surplus, lorsque le bien ayant fait l’objet de l’acte litigieux a été cédé à un sous-acquéreur, pour que cette cession soit non-opposable au créancier, celui-ci doit démontrer que les conditions de l’action paulienne sont réunies tant à l’égard du premier acquéreur que du deuxième (sous-acquéreur).

4. La défense de la caution tirée de l’absence d’exigibilité de la dette principale et de son incidence sur l’exigibilité de la dette de la caution

Il est certain qu’en matière d’engagement de cautionnement, il existe un lien entre le caractère exigible de la dette du débiteur principal (emprunteur) à l’égard du créancier et le caractère exigible de cette même dette à l’égard de la caution.

Si le débiteur principal ne peut pas être poursuivi par le créancier parce que la dette n’est pas encore exigible à son encontre, le créancier ne peut pas poursuivre la caution, sauf exceptions et hypothèses particulières liées à la procédure collective du débiteur principal. L’engagement de la caution est accessoire et l’obligation de payer est généralement subordonnée à la défaillance préalable du débiteur principal.

En tout état de cause, c’est un moyen de défense que la caution doit sérieusement considérer.

5. La défense de la caution tirée du caractère inopposable de la déchéance du terme à la caution

Il est de jurisprudence constante que la déchéance du terme (qui induit l’exigibilité anticipée du remboursement du prêt) prononcée à l’égard du débiteur principal (l’emprunteur) n’est pas opposable à la caution.

Toutefois, le tempérament à ce principe jurisprudentiel vient du fait que, par le biais d’une clause stipulée au contrat, les parties peuvent y déroger en prévoyant que les effets de la déchéance du terme prononcée à l’égard du débiteur principal, seront étendus à la caution.

Dans le cadre de la défense de la caution, il convient donc d’analyser très précisément le contrat de prêt ainsi que le contrat de cautionnement sous le prisme de cette question, et faire valoir cet argument, le cas échéant.

6. La défense de la caution dans le cadre de la prorogation expresse du terme

Dans le cadre de sa défense, une fois le terme stipulé au contrat normalement arrivé à échéance, il peut être tentant pour la caution de chercher à faire rejeter la poursuite judiciaire du créancier au motif d’une prorogation expresse du terme consentie au débiteur principal.

Le code civil ne l’entend pas spécialement ainsi en ce qu’il prévoit que, la simple prorogation du terme, accordée par le créancier au débiteur, ne décharge point la caution qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au paiement (art. 2316 c. civ.).

Le code civil est muet quant à l’éventuelle faculté de la caution d’opposer la prorogation du terme au créancier qui l’actionne en paiement.

La doctrine s’accorde à considérer que la caution simple est en droit de l’invoquer.

En revanche, s’agissant de la caution solidaire, la problématique se pose avec acuité. Le code civil prévoit que l’effet de l’engagement de la caution solidaire se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires (art. 2298 c. civ.).

Très peu d’arrêts de la cour de cassation ont été rendu en cette matière, ce qui rend difficile de dégager une tendance de fond.

Toutefois, dans le cadre de la défense de la caution, il apparaît judicieux de plaider que si le créancier proroge de manière expresse le terme de l’obligation à l’égard du débiteur principal, celui-ci n’est pas défaillant ! 

Partant, le créancier ne peut valablement actionner la caution en paiement, dont l’engagement est l’accessoire de l’obligation principale.

7. La défense de la caution dans le cadre de la prorogation tacite du terme

A l’échéance du terme du prêt contracté par le débiteur principal, le créancier peut être négligent et omettre de poursuivre le recouvrement contre ce dernier, alors-même que sa créance est devenue exigible.

Mais le créancier peut tout aussi bien, en toute conscience et de manière volontaire, décider de ne pas engager d’action en paiement de sa créance, et ainsi accorder de manière tacite une prorogation du terme.

Or, le créancier peut être déchu de ses droits contre la caution si le contrat de cautionnement stipulait de manière expresse que le créancier ne peut accorder une prorogation du terme sans l’accord de la caution.

Dans le cadre de la défense de la caution, il convient d’analyser de manière approfondie le contrat de cautionnement afin, le cas échéant, de se prévaloir de ce moyen.

8. La défense de la caution tirée du rejet d’admission de la créance au passif de la procédure collective du débiteur principal

Lorsque le débiteur principal est une personne morale soumise à une procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire), il appartient aux créanciers du débiteur de déclarer leurs créances respectives, dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d’ouverture au BODACC.

Chacune des créances déclarées peut être contestée par le débiteur devant le juge commissaire désigné par le Tribunal.

Le Juge commissaire peut :

  • soit constater qu’une instance (procès) est en cours afin de fixer le montant de la créance ;
  • soit se déclarer incompétent pour statuer sur l’admission de la créance (au profit d’une juridiction du fond compétente) ;
  • soit rejeter la créance,
  • soit enfin l’admettre, en tout ou partie du montant déclaré par le créancier.

Or, la décision d’admission de la créance par le juge commissaire est revêtue de l’autorité de la chose jugée et le créancier peut s’en prévaloir à l’égard de la caution.

Cela signifie que la caution ne peut valablement être poursuivie si le Juge commissaire a rejeté la créance déclarée par le créancier du débiteur principal.

Par ailleurs, il est permis à la caution, comme toute personne intéressée d’ailleurs, de contester l’état des créances, dans le délai d’un (1) mois à compter de la publication de cet état au BODACC, à la diligence du greffier du Tribunal (art. L. 624-3-1 c. com. et art. R. 624-8 c. com.).

Ce n’est qu’à l’expiration de ce délai que l’autorité de la chose jugée est acquise, s’agissant de l’admission de la créance.

En conséquence, dans le cadre de la défense de la caution, chaque fois que le débiteur principal est soumis à une procédure collective, il est véritablement crucial pour la caution de contester la créance devant le Juge commissaire, cela tant que le délai susvisé n’est pas expiré ; après, il sera trop tard !

Dans le cadre de la défense de la caution, le praticien doit garder à l’esprit le principe découlant des termes de l’article 2313 du code civil, qui dispose que : “La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette ;

Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur”.

9. Dans certains cas la caution devrait pouvoir invoquer la nullité relative de l’obligation principale

Lorsque l’obligation principale (généralement un contrat de prêt) a déjà été annulée, la caution peut naturellement tirer avantage de ladite nullité afin d’être déchargée de sa propre obligation.

La caution peut également invoquer une nullité absolue affectant l’obligation principale. La nullité est dite absolue lorsque les conditions imposées par la loi sont essentielles et tendent à protéger l’intérêt général, ou l’ordre public, ou les bonne moeurs.

S’agissant d’une nullité relative, il y aura nécessairement un âpre débat. La nullité est dite relative lorsqu’elle sanctionne une règle destinée à protéger une partie à l’acte.

Or, la tendance actuelle de la cour de cassation est à juger, par exemple, qu’une nullité relative d’un contrat de prêt tirée d’un dol affectant le consentement du débiteur principal est un moyen de nullité destiné à protéger ce dernier ; il s’agit donc là, pour la cour de cassation, d’un moyen purement personnel appartenant au débiteur principal, dont la caution ne peut valablement se prévaloir.

D’un point de vue intellectuel, ce raisonnement de la cour de cassation est critiquable. Par suite, ces différentes jurisprudences sont à la fois très fortement critiquées par la doctrine et combattues par les avocats praticiens du droit bancaire, notamment.

En pareille hypothèse, une bonne défense de la caution consiste pour l’avocat spécialisé à ne pas se résigner face au droit positif et aux diverses jurisprudences actuelles. Chaque fois qu’une ouverture est possible, il convient de développer une argumentation audacieuse et technique, de nature à démontrer le caractère erroné des décisions actuelles, afin d’aboutir à un revirement de jurisprudence. C’est bien là le rôle d’un avocat spécialiste !

10. La caution peut invoquer l’extinction de l’obligation principale (dette principale)

Dans les articles 1342 et suivants du code civil, le législateur établit la liste des différentes causes d’extinction de l’obligation principale ; il s’agit du paiement, de la compensation, de la remise de dette et de l’impossibilité d’exécuter.

11. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par le paiement

Si le débiteur principal s’acquitte du paiement de la dette principale, alors la caution, dont l’engagement est accessoire, ne peut être actionnée à bon droit.

Cela s’entend du paiement par le débiteur lui-même. En effet, si un tiers à l’engagement principal s’acquitte du paiement (par exemple un organisme de caution professionnel), alors ce tiers se trouve subrogé dans les droits du créancier et peut toujours se retourner contre la caution.

12. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la compensation

La compensation est le mécanisme aboutissant à l’extinction de deux dettes réciproques jusqu’à concurrence de la plus faible.

D’un point de vue de la théorie générale du droit, elle est prévue par l’article 1347 du code civil.

S’agissant plus particulièrement du contrat de cautionnement, le législateur est venu préciser à l’article 1347-6 du code civil que :

“La caution peut opposer la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal.

Le codébiteur solidaire peut se prévaloir de la compensation de ce que le créancier doit à l’un de ses coobligés pour faire déduire la part divise de celui-ci du total de la dette”.

13. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la confusion

Le mécanisme de la confusion comme modalité d’extinction d’une obligation est prévu par l’article 1349 du code civil, qui dispose : « La confusion résulte de la réunion des qualités de créancier et de débiteur d’une même obligation dans la même personne. Elle éteint la créance et ses accessoires, sous réserve des droits acquis par ou contre des tiers ».

A titre illustratif, le débiteur peut réunir ces qualités de créancier est de débiteur lorsqu’il exerce le retrait litigieux prévu par l’article 1699 du code civil : “Celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s’en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite”.

14. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la remise de dette

Le mécanisme de la remise de dette comme motif d’extinction d’une obligation est prévu par l’article 1350 du code civil, qui dispose : “La remise de dette est le contrat par lequel le créancier libère le débiteur de son obligation”.

Appliqué à l’engagement de cautionnement, le législateur a prévu de manière expresse, que la remise de dette accordée au débiteur principal libère les cautions, même solidaires (art. 1350-2 c. civ.).

15. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par l’impossibilité d’exécuter

Ce sont les articles 1351 et 1351-1 du code civil qui prévoient cette modalité d’extinction de l’obligation.

L’impossibilité d’exécuter la prestation libère le débiteur à due concurrence lorsqu’elle procède d’un cas de force majeure et qu’elle est définitive, à moins qu’il n’ait convenu de s’en charger ou qu’il ait été préalablement mis en demeure.

Au-delà des articles 1342 et suivants du code civil, d’autres dispositions légales relatives aux obligations permettent également à la caution de se défendre utilement.

16. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la novation

La novation est un contrat par lequel une obligation est éteinte et remplacée par une obligation nouvelle (art. 1329 et suivants c. civ.).

La conséquence d’une telle novation est que la caution est libérée, sous la seule exception que la caution ne consente pas à garantir la nouvelle obligation ainsi créée.

17. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la prescription

Dans le cadre de sa défense, il est certain que la caution peut valablement invoquer l’effet extinctif attaché à la prescription, mécanisme par lequel un droit personnel ou un droit réel est éteint du fait de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps.

18. La caution peut invoquer l’extinction de la dette principale par la résolution du contrat

En l’état du droit positif, la résolution du contrat principal n’est pas une exception jugée comme purement personnelle, laquelle serait réservée au débiteur principal. Ce moyen peut donc être invoqué par la caution.

Quand bien même, la jurisprudence viendrait à évoluer sur ce point, nous pensons qu’elle devrait être combattue.

De sorte que nous estimons que, dans le cadre de sa défense, la caution doit examiner l’opportunité de profiter de la résolution du contrat principal (ex.: contrat de prêt) à l’appui de sa demande d’extinction de son propre engagement de cautionnement.

La tempérament vient du fait que, si le contrat principal a reçu un commencement d’exécution (par exemple par la mise à disposition des fonds prêtés), la résolution du contrat de prêt entraîne l’obligation de restitution desdits fonds par le débiteur principal ; cette obligation pourrait demeurer garantie par l’engagement de caution.

En tout état de cause, dans le cadre de la défense de la caution, il convient d’étudier de manière approfondie l’articulation et la mise en action d’un tel moyen juridique.

Il n’est pas permis à la caution d’invoquer le caractère inopposable de la dette principal pour défaut de déclaration de créance au passif de la procédure collective du débiteur principal :

C’est l’article L. 622-26 du code de commerce qui prévoit que faute pour le créancier de déclarer sa créance dans le délai légal, il n’est pas admis dans les répartitions et les dividendes.

Cette sanction s’analyse en une inopposabilité de la créance à la procédure collective.

En l’état du droit positif, la cour de cassation juge qu’il ne s’agit pas d’une exception inhérente à la dette susceptible d’être opposée par la caution pour se soustraire à son engagement.

La caution peut invoquer la nullité du contrat de cautionnement :

19. La caution peut invoquer la nullité du contrat de cautionnement pour non-respect des règles de forme prescrites ad validatem

Le législateur a prévu un formalisme de l’engagement de cautionnement, afin d’assurer de la bonne information de la caution personne physique de la nature et de la portée de l’engagement qu’elle contracte envers un créancier professionnel (art. L. 331-1 et L. 331-2 c. consom.).

Pour être valable, l’engagement de cautionnement doit comporter une formule manuscrite reproduite de la main de la caution (ou écrite sur support électronique). La précision du montant de l’engagement, de sa duré et la place de la signature par rapport à cette mention revêtent une importance capitale, à peine de nullité de l’engagement.

A priori, ce formalisme prévu par le code de la consommation concerne le cautionnement octroyé à l’occasion d’un contrat de prêt uniquement. Il suffit que la caution soit une personne physique (par opposition à personne morale) pour bénéficier de ce mécanisme protecteur. Même un cautionnement consenti par un gérant de société est concerné. Il suffit que ce gérant ne soit pas un professionnel de la même spécialité que le prêteur. Cela signifie que le gérant de la société dont l’emprunt est cautionné ne doit pas avoir une activité dans les services bancaires et financiers.

Un premier tempérament important provient de l’éventuelle forme authentique de l’acte de cautionnement. Si l’acte est passé devant notaire, ces règles de formalisme ne s’appliquent pas.

Un deuxième tempérament concerne le “cautionnement” réel. Ce cautionnement ne constitue pas un engagement personnel du constituant. Il s’agit en réalité d’une sûretée réelle qui constitue un droit réel sur un bien du garant (le régime de fonctionnement ressemble à une hypothèque conventionnelle sur un bien immobilier). Le formalisme de l’acte de cautionnement n’a pas à s’appliquer dans cette situation.

Il est permis de noter qu’en matière de baux d’habitation, c’est l’article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 qui stipule le formalisme que doit revêtir l’engagement. La signature de la caution doit, notamment, être précédée d’une mention manuscrite stipulant de manière explicite et non équivoque la connaissance qu’elle a de la nature et de l’étendue de l’obligation qu’elle contracte (outre la reproduction d’un alinéa de ce même article).

En tout état de cause, dans le cadre de la défense de la caution, il convient impérativement de porter la plus vive attention à la question du respect de ce formalisme prévu à peine de nullité de l’engagement !

La nullité du contrat de cautionnement peut résulter du non-respect d’une règle de fond :

20. La capacité et le pouvoir de contracter le contrat de cautionnement

Comme en dispose l’article 2295 du code civil, la caution doit, notamment, avoir la capacité juridique de contracter.

La question du pouvoir de contracter s’analyse de manière différente selon que la caution est une personne physique ou une personne morale.

Dans le cadre de la défense de la caution personne physique, afin de déterminer si l’acte est valide, il conviendra de porter une attention particulière aux points suivants :

  • la caution est-elle mineure ?
  • la caution majeure est-elle sous tutelle ; sous curatelle ; sous sauvegarde de justice ?
  • la caution personne physique est-elle saine d’esprit ?
  • l’incidence du régime matrimonial des époux sur la possibilité de conclure seul un acte de cautionnement sans l’accord de l’autre époux ;
  • l’incidence de l’indivision sur la possibilité de conclure seul un acte de cautionnement en l’absence de signature des autres co-indivisaires.

Dans le cadre de la défense de la caution personne morale, afin de déterminer si l’acte est valide, il conviendra de s’intéresser aux questions suivantes :

  • la signature d’un cautionnement par une société à objet civile (via son représentant légal) entre t-elle dans l’objet social de ladite société ?
  • la signature d’un cautionnement par une société à objet commercial vise t-elle à garantir les dettes des dirigeants et associés ou l’achat ou la souscription de ses propres actions ?
  • la signature d’un cautionnement par une société à objet commercial vise t-elle à garantir des dettes d’un tiers soumises à autorisation ?
  • le caractère définitif de la délibération de l’organe autorisant le cautionnement par une personne morale de droit public.

21. Le contenu licite et certain du contrat de cautionnement

Il découle des termes de l’article 1128 du code civil que le cautionnement, comme tout contrat, doit posséder un contenu licite et certain.

A cet égard, il convient notamment que l’obligation principale garantie soit suffisamment déterminée dans le contrat de cautionnement.

Le montant garanti doit être précisé, tout comme les éventuels accessoires (intérêts, pénalités, frais) pouvant y être intégrés.

La durée déterminée ou indéterminée du cautionnement doivent être précisés en ce que cela impacte l’obligation de règlement et de couverture.

L’éventuel caractère solidaire du cautionnement doit être précisé au contrat. Il peut s’agir d’une solidarité verticale entre la caution et le débiteur principal, ou d’une solidarité horizontale entre plusieurs cautions d’une même dette, voire d’une combinaison de ces différents types de solidarités.

Dans le contrat de cautionnement, il conviendra également d’analyser les clauses relatives à l’imputation des paiements effectués par le débiteur et/ou la caution.

22. La contrepartie illusoire ou dérisoire à l’obligation contractée par la caution

C’est l’article 1169 du code civil qui précise qu’un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire.

Le contrat de cautionnement est généralement conclu à titre onéreux. S’agissant d’un prêt, c’est précisément ce financement qui constitue la contrepartie de l’engagement de cautionnement. Par suite, dans le cadre de la défense de la caution, il convient de s’interroger sur l’absence de contrepartie, notamment lorsque la caution est consentie en garantie d’un prêt ayant d’ores et déjà été accordé au débiteur principal, préalablement à la date d’engagement de la caution ou, lorsque l’octroi de délai de paiement ne constitue pas un acte positif du créancier, mais se trouve être une simple conséquence de la procédure collective du débiteur.

23. La nullité du contrat de cautionnement pour erreur

L’erreur est susceptible de vicier le consentement lorsque, sans elle, la caution n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes (art. 1130 c. civ.).

Cette erreur est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant (art. 1132 c. civ).

24. La nullité du contrat de cautionnement pour dol

L’analyse de l’article 1137 du civil révèle que le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.

Il peut également être constitué par la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

25. La nullité du contrat de cautionnement pour violence

La dernière hypothèse de nullité du contrat de cautionnement pourra être recherchée dans l’exercice d’une forme de violence à l’encontre de la caution, dans l’optique d’obtenir son consentement (art. 1130 et 1132 c. civ.).

26. La caution peut se défendre en invoquant l’extinction de l’obligation de règlement

Avant toute chose, s’agissant de l’engagement portant sur des dettes futures, il convient de faire la distinction entre l’obligation de règlement et l’obligation de couverture contractées par la caution.

Dès l’accord des volontés du créancier et de la caution, le contrat est parfait et la caution est liée.

La garantie de la caution couvre telle dette future, ou telle catégorie de dettes, voire même toutes les dettes du débiteur envers tel créancier spécifié au contrat. Ainsi, la caution est immédiatement tenue par cette obligation de couverture, même si aucune dette n’est encore née à la charge du débiteur garanti.

L’obligation de payer pesant sur la caution est distincte de cette obligation de couverture. En la matière, cette obligation se nomme “obligation de règlement”. Celle-ci ne va apparaître que lorsqu’une dette naît entre le créancier et le débiteur principal.

Lors de l’étude des moyens de défense de la caution il convient, dès que le cas d’espèce s’y prête, d’envisager la possibilité d’invoquer l’extinction de l’obligation de règlement par le paiement.

En effet, l’article 2311 du code civil doit attirer l’attention de l’avocat spécialisé dans la défense de la caution, sur le fait que l’obligation qui résulte du cautionnement s’éteint par les mêmes causes que les autres obligations. Ces causes d’extinction des obligations (et donc de l’obligation de règlement de la caution) sont donc le paiement de la dette principale, le règlement par compensation ou par confusion, le règlement par remise de dette, ou encore la prescription / forclusion de l’action en recouvrement.

27. La caution peut se défendre en invoquant le caractère disproportionné de son engagement de cautionnement

Le caractère disproportionné de l’engagement de cautionnement est distinct du moyen tiré du devoir de mise en garde pesant sur le créancier quant au risque d’endettement de la caution.

Le mécanisme est actuellement régi par les articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation.

Pour que la caution personne physique puisse valablement arguer de l’inopposabilité de son engagement de cautionnement à l’égard d’un créancier professionnel il convient, en vertu de ces dispositions légales, que deux conditions cumulatives soient réunies.

La première condition est que, au moment où elle l’a conclu, l’engagement ait été manifestement disproportionné par rapport aux revenus et biens de la caution. Il ne suffit donc pas qu’il soit disproportionné, les juges du fond s’attachant à vérifier que cette disproportion est manifeste.

A supposer que l’engagement soit manifestement disproportionné aux biens et revenus de la caution, encore faut-il remplir une deuxième condition : lorsque la caution est appelée en paiement, il ne faut pas qu’au bénéfice d’un retour à meilleur fortune, son patrimoine lui permette finalement de s’acquitter de la dette (sinon elle sera tout de même tenue au paiement, même si au départ son engagement était effectivement disproportionné !).

A l’appui de ce moyen juridique, ce sont sur ces deux conditions distinctes qu’il convient de développer une défense structurée de la caution, afin d’écarter la demande en paiement dirigée contre elle.

Le terme cofidéjusseur désigne les personnes qui se sont rendues cautions d’un même débiteur pour une même dette.

28. La caution peut se prévaloir d’une remise de dette consentie par le créancier à une autre caution

Il découle des dispositions de l’article 1350-2 du code civil que la remise de dette consentie à l’une des cautions solidaires ne libère pas le débiteur principal, mais libère les autres cautions à concurrence de sa part.

Par suite, ce que le créancier a reçu d’une caution pour la décharge de son cautionnement doit être imputé sur la dette et décharger le débiteur principal à proportion. Les autres cautions ne restent tenues que déduction faite de la part de la caution libérée ou de la valeur fournie si elle excède cette part.

29. La caution peut se prévaloir de la qualité de créancier d’un cofidéjusseur

La solution applicable en cette matière résulte des termes de l’article 1349-1 du code civil.

Lorsqu’une caution de la dette principale possède elle-même la qualité de créancière du créancier principal, cela n’a pas pour conséquence d’éteindre la dette principale. En revanche, cela a pour effet de permettre à cette “caution-créancière” de poursuivre les autres cofidéjusseurs, déduction faite de sa quote part.

30. La caution peut se prévaloir de la novation de l’obligation de l’un des cofidéjusseurs

L’article 1335, alinéa 2 du code civil dispose que la novation convenue entre le créancier et une caution ne libère pas le débiteur principal. En revanche, il est acquis par ce texte qu’elle libère les autres cautions à concurrence de la part contributive de celle dont l’obligation a fait l’objet de la novation.

31. La caution peut se prévaloir de la nullité du contrat de cautionnement d’un cofidéjusseur

La nullité de l’un des engagements de cautionnement produit des effets sur les autres cofidéjusseurs, en raison des dispositions de l’article 1315 du code civil.

Le débiteur solidaire poursuivi par le créancier peut opposer les exceptions qui sont communes à tous les codébiteurs, telles que la nullité ou la résolution, et celles qui lui sont personnelles.

Il ne peut opposer les exceptions qui sont personnelles à d’autres co-débiteurs, telle que l’octroi d’un terme.

Le fait le plus important est que lorsqu’une exception personnelle à un autre codébiteur éteint la part divise de celui-ci, notamment en cas de compensation ou de remise de dette, il peut s’en prévaloir pour la faire déduire du total de la dette.

La caution peut invoquer le non-respect par le créancier de l’obligation d’information pesant sur lui :

32. L’obligation d’information annuelle de la caution d’une entreprise pesant sur les établissements de crédit

L’article L. 313-22 du code monétaire et financier dispose que les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement.

Si l’engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

La sanction du non-accomplissement de cette formalité est sévère en ce qu’il emporte, dans les rapports entre la caution et l’établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information.

Cette obligation d’information annuelle de la caution est par ailleurs étendue à la caution indéterminée garantissant une dette professionnelle d’un entrepreneur individuel (art. 47 II al. 2 Loi n° 94-126 du 11 fév. 1994).

33. L’obligation d’information annuelle de la caution personne physique pesant sur le créancier professionnel

Toute personne physique qui s’est portée caution à l’occasion d’une opération de crédit est informée par l’établissement prêteur de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement caractérisé susceptible d’inscription au fichier sur les incidents de paiement (art. L. 314-17 c. consom.).

Par ailleurs, toute personne physique qui s’est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement (art. L. 333-1 c. consom.). En cas de manquement, la caution n’est pas tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée (art. L. 343-5 c. consom.).

Dans le cadre de la défense de la caution il faut se garder de considérer un tel moyen comme purement anecdotique. 

En pratique en effet, il n’est pas rare de connaître des dossiers où le montant des intérêts et frais constitue une fraction très substantielle par rapport au montant de la dette en principale, voire le dépasse dans certains cas !

34. L’obligation d’information annuelle de la caution personne physique indéfinie

C’est l’article 2293 du code civil qui prévoit que, lorsque ce cautionnement est contracté par une personne physique, celle-ci est informée par le créancier de l’évolution du montant de la créance garantie et de ces accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat.

La sanction du non-respect de cette obligation est la déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités.

35. L’obligation d’information de la caution de la défaillance du débiteur

Divers dispositions légales prévoient l’obligation d’informer la caution de la défaillance du débiteur.

S’agissant de la caution garantissant un prêt à la consommation ou un crédit immobilier, c’est l’article L. 314-17 du code de la consommation qui le prévoit.

Pour ce qui est du cautionnement octroyé par une personne physique en faveur d’un créancier professionnel, il convient de se reporter aux articles L. 331-1 et L. 343-5 du code de la consommation.

Lorsque la caution garantit un crédit à une entreprise individuelle, ce mécanisme est prévu par l’article 47 II al. 2 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994.

Notons enfin que, s’agissant d’un bail d’habitation, le bailleur doit informer la caution dans un délai de quinze jours à compter de la délivrance du commandement de payer visant la clause résolutoire (art. 24 I al. 3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989).

36. La caution peut invoquer la faute du créancier qui l’empêche d’exercer son bénéfice de subrogation (bénéfice de cession d’action)

Le législateur cherche à préserver le recours subrogatoire de la caution. Ainsi, au travers de l’article 2314 du code civil, il est prévu que la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier, ne peut plus, par le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de la caution.

Toute clause contraire est réputée non écrite.

37. La caution peut chercher à mettre en cause la responsabilité civile du créancier ou d’un tiers

Puisque l’obligation de règlement contractée par la caution au profit du créancier peut s’éteindre, notamment, par la compensation (art. 2311 c. civ. et art. 1347-6 c. civ.), une défense véritablement très efficace de la caution peut notamment résulter de la mise en cause de la responsabilité du créancier (souvent une banque) ou d’un tiers (par exemple un organisme de cautionnement professionnel qui paye le créancier en cas de défaillance du débiteur) et la condamnation du fautif à lui payer des dommages-intérêts à titre de réparation du préjudice.

L’objectif est ensuite d’obtenir la compensation judiciaire entre les deux dettes connexes, afin d’obtenir l’extinction de tout ou partie de l’obligation de règlement. 

En pratique, le jugement rendu est à “double détente”. La caution est condamnée à payer le créancier au titre de son engagement de cautionnement mais, dans le même temps, le créancier est quant à lui condamné à payer des dommages-intérêts à la caution en réparation de sa faute qui lui cause un préjudice. Par suite, par le mécanisme de la compensation, ces deux dettes connexes s’annulent, jusqu’à concurrence de la plus faible. C’est un mécanisme redoutablement efficace qui connaît de constantes applications judiciaires !

Dans ce cadre, la caution peut tout d’abord chercher à mettre en cause la responsabilité de la banque au titre de son obligation d’information et de conseil (pouvant aller jusqu’au devoir de mise en garde, c’est-à-dire de dissuader la caution de s’engager) relatif à son risque d’endettement. Le créancier-banquier peut être condamné pour ne pas avoir dissuadé la caution de contracter et, ainsi, lui avoir fait perdre une chance de ne pas contracter un engagement ruineux.

La caution peut ensuite rechercher la responsabilité du créancier-banquier pour soutien abusif du crédit au débiteur principal (dont la dette est garantie par la caution). Lorsque les perspectives de redressement du débiteur sont obérées, la persistance de soutien financier du créancier (souvent un établissement financier) peut être qualifiée d’abusive par le juge en ce qu’elle ne fait qu’augmenter le passif du débiteur, au détriment des créanciers existants. Un tel soutien ne fait que complexifier le remboursement du passif, voire le rendre illusoir.

Mais la responsabilité de la banque créancière peut tout aussi bien être recherchée pour rupture abusive de son concours.

En matière de crédit à durée déterminée, la banque ne peut mettre fin à son concours sans engager sa responsabilité, à moins que la situation irrémédiablement compromise du débiteur n’impose une telle rupture.

En matière de crédit à durée indéterminée, il résulte des termes de l’article L. 313-12 du code monétaire et financier, que celui-ci ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l’expiration d’un délai de préavis fixé lors de l’octroi du concours. Ce délai ne peut, sous peine de nullité de la rupture du concours, être inférieur à soixante (60) jours.

Le tempérament de ces principes vient du fait que ce même article précise que l’établissement de crédit ou la société de financement n’est pas tenu de respecter un délai de préavis, que l’ouverture de crédit soit à durée indéterminée ou déterminée, en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit ou au cas où la situation de ce dernier s’avérerait irrémédiablement compromise.

Mais l’application de ces règles légales par la banque ne doit pas dégénérer en abus de droit ! 

Dans le cadre de la défense de la caution il convient de ne pas hésiter à rechercher la responsabilité de la société de crédit ou de la société de financement lorsque la rupture de crédit est fautive à l’égard du débiteur principal, et que cela cause un préjudice à la caution. Le préjudice souffert par la caution consiste généralement en la perte de chance de ne pas être appelée dans le cadre de son engagement.

38. La caution peut exercer un recours avant paiement contre le débiteur principal

Dans certaines hypothèses prévues par les articles 2309 et 2316 du code civil, il est permis à la caution précautionneuse, qui anticipe les difficultés du débiteur principal, d’exercer un recours contre ce dernier, et ce avant-même d’avoir payé le créancier.

Agir très vite contre le débiteur permet à la caution d’éviter, autant que faire se peut, que la situation économique et financière du débiteur principal ne s’altère encore plus qu’elle ne l’est, diminuant grandement l’intérêt de l’exercice classique du recours après paiement (voir § n° 39 ci-dessous).

Bien entendu, la caution ne pourra pas demander à être “remboursée” de sommes qu’elle-même n’a pas payées au créancier, puisque par hypothèse, il s’agit d’un recours avant paiement.

Il s’agira pour la caution, et ce n’est pas rien, d’obtenir l’autorisation de prendre des mesures conservatoires contre le débiteur et/ou d’obtenir la constitution d’une sûreté à son profit. Il pourra également s’agir d’obtenir le paiement par le débiteur d’une somme d’argent à titre d’indemnité destinée à compenser l’aggravation du risque qu’elle subit d’être appelée.

Ainsi, la caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée :

1° Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;

2° Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;

3° Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;

4° Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;

5° Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.

Elle peut également agir en paiement contre le débiteur lorsque le créancier lui accorde une prorogation du terme.

39. La caution peut exercer un recours après paiement contre le débiteur principal

La caution qui paie le débiteur principal dispose d’une action récursoire contre le débiteur principal.

Pour arriver à cette fin, elle dispose de deux moyens juridiques différents.

Le premier est un recours personnel contre le débiteur, en vertu des dispositions de l’article 2305 du code civil. Ce recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et les frais.

Le deuxième est un recours subrogatoire, qui découle des termes de l’article 2306 de ce même code. La caution est subrogée à tous les droits qu’avait le créancier contre le débiteur. Cela s’entend notamment du transfert des sûretés et accessoires attachées à la créance ainsi transmise.

La perte de recours et les précautions de la caution :

La caution doit être attentive à ne pas perdre le droit d’exercer son recours après paiement.

L’article 2308 du code civil prévoit en effet que la caution qui a payé une première fois n’a point de recours contre le débiteur principal qui a payé une seconde fois, lorsqu’elle ne l’a point averti du paiement par elle fait. Elle peut néanmoins exercer une action en répétition contre le le créancier.

Ce même article prévoit également que, lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n’aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte ; sauf là encore son action en répétition contre le créancier.

40. Le recours de la caution contre les “autres” cautions (cofidéjusseurs) et contre les sous-cautions :

Il est permis à la caution de chercher à garantir son recours contre le débiteur principal. Le débiteur principal fournit une sous-caution à sa propre caution (appelée caution de premier rang).

Le régime de ce contrat de sous-cautionnement est identique au contrat de cautionnement proprement dit.

Le recours de la caution contre une autre caution de la même dette du débiteur principal (cofidéjusseur) est distinct de son recours contre une sous-caution.

41. Le recours contre un cofidéjusseur

Au visa des dispositions de l’article 2310 du code civil, la caution peut exercer un recours personnel contre les autres cautions (cofidéjusseurs), chacune pour sa part. Chaque cofidéjusseur est tenu envers la caution solvens que pour “sa part et portion”, c’est-à-dire pour sa quote-part de la dette qu’elle doit supporter dans l’hypothèse de l’insolvabilité du débiteur principal.

La caution peut également exercer un recours subrogatoire contre les cofidéjusseurs, au visa de la théorie générale de la subrogation prévue par l’article 1346-3 de ce même code.

42. Le recours contre la sous-caution

La caution ne peut pas agir avant paiement contre la sous-caution.

Dans les rapports entre le débiteur principal, la caution et la sous-caution, la caution est traitée comme le créancier garanti et la sous-caution, comme la caution. De sorte que la caution dispose non pas d’un recours subrogatoire contre la sous-caution, mais bien d’un recours personnel.

Les restrictions à la poursuite de la caution par le créancier :

43. Les conséquences de l’accord de conciliation

L’article L. 611-10-2 du code de commerce autorise aux garants (dont la caution) le droit de se prévaloir des mesures accordées au débiteur principal dans le cadre d’un accord de conciliation constaté ou homologué par le Tribunal.

La caution peut également se prévaloir des délais de paiement ayant été accordés par le juge durant cette procédure (art. L. 611-7 c. com.).

Les éventuelles garanties prises durant la phase de conciliation ne sont pas conservées par le créancier en cas d’ouverture d’une procédure collective mettant fin à la procédure de conciliation (art. L. 611-12 c. com.). Les créanciers recouvrent toutefois l’intégralité de leurs créances et sûretés (c’est-à-dire celles antérieures à l’accord de conciliation).

44. Les conséquences de la période d’observation sur la caution personne physique

Durant toute la période d’observation (en procédure de sauvegarde ainsi qu’en procédure de redressement) et jusqu’au jugement arrêtant le plan de redressement ou prononçant la liquidation judiciaire, il est interdit au créancier d’agir aux fins d’obtenir un paiement contre la caution personne physique : c’est l’arrêt des poursuites (art. L. 622-28 et L. 631-14 c. com.).

Les poursuites (instances judiciaires) susceptibles d’avoir déjà été introduites sont interrompues.

Le créancier peut prendre des mesures conservatoires contre la caution (art. L. 622-28 c. com. et R. 511-7 c. proc. civ. exéc.).

45. La caution personne physique et les plans de sauvegarde et de redressement

En vertu des dispositions de l’article L. 626-11 du code de commerce, la caution personne physique peut se prévaloir des dispositions du plan de sauvegarde (délais de paiement / remises).

En revanche, elle ne peut pas invoquer à son profit les termes d’un plan de redressement, ce y compris les délais et remises accordés au débiteur (art. L. 631-20 c. com.).

46. La caution personne morale

La caution personne morale a uniquement le droit de se prévaloir de l’accord de conciliation.

En revanche, elle ne peut pas se prévaloir des dispositions du plan de sauvegarde, ou du plan de redressement.

Ce faisant, la caution personne physique est tenue de la partie de la dette exigible.

47. Les conséquences de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire sur la caution

Les créanciers restent autorisés à poursuivre les cautions.

La caution est liée au créancier dans les termes de son propre engagement. De sorte que la déchéance du terme à l’égard du débiteur, résultant du jugement d’ouverture de liquidation, est sans effet sur la caution. Il convient de se reporter au contrat de cautionnement proprement dit.

48. Les moyens de défense “classiques” de la caution

La caution appelée dans le cadre d’une procédure collective du débiteur principal peut, pour l’essentiel, invoquer l’entier bénéfice des différents moyens de défense évoqués dans le cadre de la présente étude.

Toutefois, le particularisme du droit des procédures collectives ─ pour l’essentiel un droit spécial qui déroge au droit commun ─, commande d’apporter des explications supplémentaires s’agissant des moyens de défense de la caution.

Elles sont précisées ci-dessous.

49. Le moyen de défense de la caution tiré du caractère irrégulier de la déclaration de créance et de son rejet

Si la caution ne peut valablement opposer comme moyen de défense le fait que la créance serait inopposable à la procédure, en l’absence de déclaration à son passif (voir sous § n° 18 ci-dessus), la situation est différente lorsqu’une déclaration a bien été faite, mais que celle-ci est irrégulière.

En effet, en pareille hypothèse, une déclaration de créance irrégulière entraîne le rejet de la créance (art. L. 624-2 c. com.).

Or, la Cour de cassation juge que la déclaration irrégulière de la créance a pour conséquence l’extinction des sûretés réelles ou personnelles (cautionnement) la garantissant.

Dans le cadre de la défense de la caution, il convient de plus fort d’analyser la validité de la déclaration de créance du créancier et de poursuivre son rejet devant le juge commissaire.

50. Le moyen de défense de la caution tiré de l’impossibilité pour la caution de se prévaloir du bénéfice de subrogation

Au visa de l’article 2314 du code civil, la caution peut échapper au paiement si elle arrive à démontrer qu’en raison de la faute du créancier qui n’a pas déclaré sa créance, elle est empêchée de se prévaloir par subrogation d’une sûreté réelle ou, pire encore, qu’elle a perdu le droit d’agir en justice.

51. Le moyen de défense de la caution tiré du rejet de la créance (renvoi)

Nous avons déjà démontré que la caution ne peut pas être valablement poursuivie si le Juge commissaire a rejeté la créance déclarée par le créancier du débiteur principal (voir § n° 8 ci-dessus).

52. Le moyen de défense tiré de la prescription

La prescription relative à l’action en recouvrement contre la caution est interrompue par la déclaration de créance jusqu’à la clôture de la liquidation.

A compter de cette date, un nouveau délai de cinq (5) ans commence à courir.

Lorsqu’elle est acquise, la caution est en droit de tirer avantage de la prescription de l’action pour faire déclarer irrecevable l’action en paiement dirigée contre elle.

Le recours de la caution dans le cadre des procédures collectives :

53. Le recours de la caution durant la procédure collective

Y compris durant la phase active de la procédure collective, la caution solvens (qui a payé) dispose d’un recours personnel et d’un recours subrogatoire contre le débiteur.

Pour être dirigée contre le débiteur failli, il convient toutefois (sous réserve de quelques exceptions jurisprudentielles) que la créance de recours soit déclarée au passif de la procédure.

54. Le recours de la caution après la clôture de la liquidation

Des effets de l’article L. 643-11 du code de commerce, il découle qu’à l’issue de la procédure de liquidation pour insuffisance d’actif, formalisée d’un point de vue procédural par le jugement de clôture, les créanciers ne recouvrent pas le droit d’agir en recouvrement contre le débiteur.

En revanche, ce même article est favorable à la caution en ce qu’il prévoit que les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle (i.e. une caution) ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent poursuivre le débiteur s’ils ont payé à la place de celui-ci.

Cette liste de 54 moyens de défense et de recours de la caution ne se veut pas exhaustive.

En revanche, elle se veut illustrative du fait qu’en pratique, lorsque la caution est appelée, elle ne doit en aucun cas se résigner à payer !

Bien au contraire, la caution est légitime à combattre avec force l’action en paiement du créancier (banque, société de caution mutuelle) en recourant aux nombreux moyens juridiques dont elle dispose !