Bail commercial : que faire en cas de refus de la demande de révision triennale du loyer ?
Dans le cadre d’une demande de révision du montant du loyer ouverte au titre de la révision triennale légale prévue par l’article L. 145-38 du code de commerce, l’hypothèse de l’acceptation de la demande de révision par le cocontractant ne pose guère de difficulté. Le montant révisé est applicable à compter de la date de la demande de révision (art. R. 145-20, al. 3 c.com.).
En cas de refus, le différend devra être tranché par le juge.
Saisine facultative de la commission de conciliation
Toutefois, et cela est une innovation de la loi n° 2014-16 du 18 juin 2014, la partie qui y a intérêt, peut préalablement à la saisine du juge, tout d’abord saisir la commission départementale de conciliation.
Cette commission départementale qui, auparavant, avait un champ de compétence confiné à la fixation du montant du loyer du bail renouvelé, étend désormais sa faculté de concilier les parties en matière de loyer révisé, ainsi d’ailleurs qu’aux charges et travaux.
Saisine du juge
En première intention directement, ou après l’échec de la tentative de conciliation devant la commission départementale, le différend peut être porté à compter du 1er janvier 2020 devant le Président du Tribunal judiciaire (anciennement Tribunal de grand instance).
À peine de prescription, l’instance doit être introduite dans un délai de deux ans à compter du fait générateur du droit (en l’espèce la notification du refus du montant révisé).
Durant toute la durée de la procédure, le locataire est tenu de s’acquitter à bonne date du paiement du loyer, au prix ancien (non révisé) voire, le cas échéant, à celui fixé de manière provisoire par le juge (art. L. 145-57 c. com).
La procédure est strictement réglementée par les dispositions des articles R. 145-23 à R. 145-33 du code de commerce.
La procédure est dite “sur mémoire”. La spécificité de la matière est que les parties s’échangent des écritures notifiées par courriers recommandés avec avis de réception.
De manière plus précise, le demandeur doit, avant toute délivrance d’une assignation, notifier au défendeur par courrier recommandé avec demande d’avis de réception, son argumentation en fait et en droit (outre les pièces à l’appui de ses demandes).
Ce n’est que passé un délai d’un mois à compter de la date de réception du mémoire de demandeur, que la juridiction peut être saisie par voie d’assignation introductive d’instance.
Le défendeur est en droit de faire valoir son argumentation en fait et droit, qui doit être notifiée par courrier recommandé avec demande d’avis de réception.
Expertise amiable / rapport privé
En la matière, il est fréquent qu’une partie demande à un expert agréé d’établir un rapport privé sur la valeur locative du local. Compte tenu de la technicité de la matière, cette pratique est en effet recommandée. L’expert intervient de manière privée (conventionnelle), c’est-à-dire sans être désigné à cet effet par un juge. Ce rapport est admissible devant le juge en tant qu’élément de preuve soumis à la libre discussion des parties.
Jurisprudence
Cass. 3ème civ., 26 nov. 1997, n° 96-11546 (non publié au bulletin)
Évaluation de la valeur locative par un expert “judiciaire” agréé près la Cour d’appel et les tribunaux
Sans qu’il soit obligé de l’ordonner, le juge peut à la demande de la partie la plus diligente et qui y a intérêt, ordonner la désignation d’un expert dont la mission consistera à apprécier les divers critères prévus par la loi et les règlements entrant dans l’évaluation de la valeur locative (art. R. 145-30 c. com.).
Jurisprudence
Cass. 3ème civ., 22 janv. 1997, n° 94-21352, Bulletin 1997, III, n° 19, p. 11
L’expert rédigera et déposera un rapport, dont les conclusions ne lient pas le juge, mais lui permettent néanmoins de disposer d’éléments objectifs, circonstanciés et propres au marché local, lui permettant de forger sa religion dans le cadre du jugement à intervenir.